Vous êtes-vous déjà demandé comment bien choisir la matière d'un vêtement?
Que signifie acrylique ou polyamide? En quoi le coton biologique est-il intéressant? Qu'est-ce que la viscose, le bambou, la soie? Quelles sont les alternatives éthiques en matière de fibres textiles?
Pour consommer la mode éthique, durable, éco-responsable et réfléchie, plusieurs options s'offrent à vous: la production locale (le « locally-made » ), le respect du savoir-faire, le respect de l'environnement et des conditions des travailleurs du textile et enfin, vous pouvez choisir des matières textiles durables.
Il existe des dizaines de tissus et de fibres textiles. Nous dressons dans cet article un panaroma des matières principales qui composent votre garde-robe. Nous distinguerons 2 familles de fibres:
Les fibres naturelles
Coton, soie, lin, chanvre, laine, cachemire, mohair...
Les fibres manufacturées
Viscose, modal, lyocell, polyester, nylon, acrylique...
Dans chaque catégorie, nous inclurons les fibres alternatives et innovantes telles que le coton biologique, la laine biologique, la soie sauvage, le lyocell ou en core les fibres textiles recyclées.
LES FIBRES NATURELLES
Le coton
Le coton est une fibre qui recouvre la graine de fruit du cotonnier. Les principaux pays producteurs sont la Chine, les Etats-Unis, l'Inde, le Pakistan et le Brésil. La production mondiale de coton en 2010 représentait 25% de la production totale de fibres.
Pour répondre à la demande grandissante en fibres textiles, la production de coton n'a cessé d'augmenter tandis que la surface de terres disponibles pour sa culture est restée identique. L'utilisation excessive de fertilisants et de pesticides rend la culture du coton néfaste pour l'environnement, l'homme et les agriculteurs qui le cultivent. On estime que 11% des pesticides utilisés dans le monde est consacrée à la culture du coton. La consommation d'eau dans la culture du coton est également problématique. Cultiver 1kg de coton peut nécessiter jusqu'à 3800 litres d'eau! Les techniques d'irrigation des plantations sont à améliorer afin que l'eau soit utilisée de manière rationnelle et optimisée. En Asie Centrale, on estime à 60% la quantifié d'eau perdue en raison de mauvaises infrastructures.
L'ALTERNATIVE : LE COTON BIOLOGIQUE
Le coton biologique est cultivé sans engrais ni pesticides chimiques. La fibre est blanchie à l'eau oxygénée et la teinture est réalisée sans métaux lourds. La gestion de la fertilité des sols est obtenue par la rotation des cultures, l'utilisation de terreau et l'emploi de déchets d'huile de palme et de fumier animal. L'impact social est également pris en considération dans la production de coton biologique grâce au coton "Fair Trade" qui garanti un salaire décent pour les producteurs. Il n'est pas suffisant de cultiver le coton de manière biologique, il faut aussi le produire de manière éthique et non polluante. Rappelons que même si le coton est cultivé de manière biologique, il est ensuite traité, et teint. Le Global Organic Textile Standard fournit une liste de procédés de fabrication et de teinture acceptés dans le traitement du coton biologique. Le coton biologique représente 0,7% de la production totale de coton (production 2010-2011). Pour une surface cultivable égale, on produit 50% de coton biologique en moins par rapport au coton conventionnel; pour un coût en moyenne 20% plus élevé ( ce qui n'encourage malheureusement pas sa culture à plus grande échelle). Le coton biologique a une texture plus souple, plus douce et donc plus agréable à porter. La collection The First par Made & More est concue à partir de coton 100% biologique. Le denim et le velours biologiques sont fabriqués à partir de coton biologique.
Le lin
La culture du lin requière l'utilisation de fertilisant pour accélérer la pousse et d'herbicide pour empêcher l'apparition de mauvaises herbes. Le lin peut cependant être cultivé de manière simple, sans l'utilisation de fertilisants pour autant qu'il y ait de l'eau. La fibre de lin est également une fibre qui peut pousser sur des sols impropres à la culture de nourriture. Le lin est par conséquent une fibre durable.
La laine
La laine est une fibre qui provient du lainage des moutons. La production de laine requière l'utilisation de pesticides, tout comme la production de coton. Les moutons sont traités avec des insecticides (soit par injection soit par immersion dans un bain). Ils sont nécessaires pour prévenir les infections du troupeau, mais peuvent cependant s'avérer néfastes pour l'homme et l'environnement. La laine de mouton est généralement considérée comme un produit secondaire, l'élevage étant d'abord destiné à la consommation. C'est pourquoi la laine est généralement de faible qualité, car peu entretenue. La laine de mouton Merino est quant à elle une laine de très haute qualité, un mouton Merino peut produire jusqu'à 5 kg de laine par tonte. La laine de mouton doit être nettoyée avant le filage. Ce lavage requière l'utilisation d'eau chaude (ou de solvant) afin d'émulsionner les graisses. Les pesticides restent dans les eaux usées et finissent dans la nature. Il est important dès lors de privilégier les producteurs ayant une gestion efficace des eaux usées.
L'ALTERNATIVE : LA LAINE BIOLOGIQUE
La laine biologique provient de moutons élevés à la nourriture biologique, qui broutent des terres non traitées aux pesticides et qui ne sont pas traités avec des pesticides chimiques, contrairement à la laine conventionnelle.
La soie
La soie est un filament textile issu du cocon produit par la chenille du ver à soie. Elle est cultivée sur des mûriers, arbres qui requièrent l'utilisation de pesticides et de fertilisants. La quantité de pesticides est cependant bien moindre que celle utilisée pour la culture du coton. Le ver à soie étant très fragile, l'utilisation de pesticides doit rester limitée. Le cocon est constitué de 2 à 3km de fil mais seulement 600 à 1000m de fil peuvent donner un filament textile exploitable.
L'ALTERNATIVE : LA SOIE SAUVAGE
La soie sauvage est cultivée à partir de vers à soie élevés dans des forêts où l'accès à la nourriture est facile et où il n'y a pas de produits chimiques dangereux. La chrysalide est récoltée après que la chenille ait éclos de manière naturelle (tandis que pour la soie conventionnelle, la larve est tuée in situ). La soie sauvage est considérée de moins bonne qualité que la soie conventionnelle du simple fait que la chenille est restée plus longtemps dans le cocon et l'a donc endommagé.
Le chanvre
Le chanvre pousse et croit très rapidement sans avoir recours à des fertilisants et des pesticides. La culture de chanvre assainit les sols pour d'autres cultures, améliore la qualité de sols, ses fortes racines contrôlent l'érosion. Il en résulte que le chanvre est une alternative écologique et durable en termes de fibre textile.
Le polyester
Le polyester est une fibre synthétique fabriquée par voie chimique. Le polyester résulte de la condensation de 2 composants issus du pétrole: un acide (acide térephtalique) et un alcool (éthylène glycol). Les agents utilisés dans la production de fibres de polyester sont issus de la pétrochimie. L'énergie nécessaire pour produire 1kg de polyester est estimée à 109MJ. La production de polyester génère également des émissions toxiques si elles ne sont pas traitées: cobalt, sels de manganèse, bromide de sodium, antimony oxyde et du dioxyde de titane. Une alternative au polyester est le PLA (acide polyactique).
L'ALTERNATIVE : ACIDE POLYACTIQUE & BIOPOLYMERE
L'acide polyactique est un biopolymère dérivé de blé, une source 100% renouvelable. Contrairement au polyester qui est produit à partir de combustibles fossiles et non biodégradable, l'acide polyactique est une fibre dérivée de cultures renouvelables. Les biopolymères ont l'avantage de consommer moins d'énergie et de dégager moins d'émissions mais une question se pose quant à la production intensive de blé destinée à produire des fibres plutôt que d'être destinée à la consommation.
Le nylon ou le polyamide
Le nylon est une fibre synthétique fabriquée par voie chimique. Le nylon, similaire à la fibre de polyester, est également une fibre issue de la pétrochimie. Sa production rappelle les mêmes problèmes environnement, sociaux et politiques liés à l'industrie du carbone. Pour fabriquer la fibre de Nylon 6.6, 2 molécules sont assemblées entre elles (hexaméthylènediamine et acide adipique) pour former un polymère. Le polymère est ensuite extrait et refroidi. Le procédé est donc un procédé hautement énergivore (pression et haute température). La production de nylon émet également des émissions d'oxyde nitreux, un gaz à effet de serre.
L'acrylique
L'acrylique est une fibre produite à partir d'huile minérale ou d'autres hydrocarbones. Les polymères d'acrylique sont produits en forçant une réaction entre l'acrylonitrile et des substances chimiques telles que le styrène, l'acétate de vynile, le persulfate d'ammonium et le fer. La fibre est ensuite tissée, lavée à l'eau chaude pour enlever les résidus de solvants puis maintenue dans des cuves d'eau presque bouillante afin de faire durcir la fibre. La fibre est ensuite plongée dans un bain d'acide pour lui donner des propriétés antistatiques puis finalement séchée. L'énergie nécessaire pour la production d'acrylique est 30% plus élevée que pour la production de polyester.
La viscose
La viscose est un fibre artificielle fabriquée à partir de cellulose extraite de végétaux. Les fibres cellulosiques telles que la viscose sont formées à partir d'un polymère naturel qui est chimiquement dissout puis extrait en un filament continu. Le bois (notamment le hêtre qui pousse rapidement) est une source de cellulose pour la production de viscose. La matière première des fibres cellulosiques est considérée comme neutre en carbone mais la production de la fibre a des impacts environnementaux significatifs. La cellulose est d'abord purifiée et blanchie puis trempée dans de l'hydroxyde de sodium. Elle est ensuite traitée au sulfure de carbone et enfin plongée dans une solution d'acide sulfurique, de sulfate de sodium, de sulfate de zinc et de glucose. La production de viscose génère des émission de sulfure, d'oxyde nitreux, de sulfure de carbone et de sulfure d'hydrogène dans l'air. L'eau est polluée par les mêmes émissions.
Le bambou est aussi source de cellulose. La viscose de bambou est fabriquée de la même façon que la viscose standard. La viscose de bambou a un toucher très doux, une capacité à évacuer la transpiration et un taux d'absorption d'humidité élevé. Préfrez la viscose issue de bois provenant de forêts gérées de manière durables. Le modal est une fibre textile fabriquée à partir de pâte à bois.
L'ALTERNATIVE : LE LYOCELL
Le lyocell est une fibre cellulosique produite à partir de pulpe de bois d'eucalyptus. Le procédé de fabrication est écologique car le solvant utilisé est recyclé à 99%. La pulpe de bois est dissoute dans un solvant, puis tissée en fibres. Le procédé de fabrication récupère 99,5% du solvant qui est purifié puis recyclé dans le procédé de fabrication. Le solvant est non toxique, non corrosif et tous les effluents produits sont non dangereux. Le Lyocell a la particularité d'être entièrement biodégradable (6 semaines dans un tas de compost aéré), l'eucalyptus (matière première) a un cycle de croissance très rapide (maturité atteinte après 7 ans) et le bois provient de forêts gérées de manière durable. La fibre n'est pas blanchie car elle est naturellement très propre. Seul inconvénient... sa production est énergivore.
FIBRES TEXTILES, COMMENT CHOISIR ?
Le choix en matière de fibres textiles est vaste et il n'existe pas de recette miracle ni de matière parfaite en termes de respect de l'homme et de l'environnement. Cependant, opter pour des tissus en connaissant leur impact est déjà un bon point!
La nuance est de mise. Rappelons que la quantité d'eau nécessaire pour produire 1kg de polyester est inférieure à la quantité nécessaire pour produire 1kg de coton, mais l'énergie nécessaire est quant à elle bien plus élevée pour le polyester. Une fibre sera tantôt plus énergivore, tantôt plus durable, la culture de certaines fibres telles que coton requière l'utilisation d'une grande quantité de fertilisants et de pesticides.
De manière générale, privilégiez les matières d'origine naturelle ou optez pour les alternatives qu'offrent les fibres manufacturées (Lyocell, biopolymères). Préférez le coton biologique au coton conventionnel. La marque CUS par exemple a choisi de fabriquer toutes ses collections avec des tissus innovants et éco-responsables tels que
le coton biologique, le bambou, le chanvre, le plastique recyclé, le lin.
Continuez à vous faire plaisir et à chérir les vêtements que vous achetez. Et dorénavant vous pourrez porter un autre regard sur les matières qui se trouvent dans votre dressing ! Bon shopping !
Sources:
Kate Fletcher, "Sustainable Fashion And Textiles - Design Journeys", Routledge, 2e édition, 2014
Fletcher et Grose, "Fashion and sustainability, design for change", Laurence King, 2012
Daniel Weidmann, "Technologie des textiles - De la fibre à l'article", Dunod, 2e édition, 2012
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